We don't fight like in movies anymore 2020

 

Sur un mur en béton tagué, dans ce qui ressemble à un terrain vague, une affiche se consume à petit feu. Sur celle-ci, une jeune femme nue, nous faisant face mais dont le regard se perd dans un hors-champ, est dévorée par les flammes. Son mollet droit est le premier à être rongé. Une deuxième photographie nous montre la même scène, quelques instants plus tard : le visage aux longs cheveux est sur le point de disparaître, la calcination bientôt aura détruit l’entièreté du corps. Mais la narration s’arrête là. Chez Julie Coulon, les représentations, qu’elles soient vidéo ou photographiques valent pour ce qu’elles sont : des images, auxquelles il ne faudrait pas tant se fier. Cette jeune femme ne s’embrase pas, seule sa reproduction sur papier glacé brûle sous nos yeux.

Dans le travail de l’artiste, l’artificialité n’est pas masquée : elle préfère bien souvent aux scènes extérieures le studio, qui donne à ses modèles une dimension inévitablement cinématographique, apprécie les poses que l’on devine empruntées aux tableaux religieux de la Renaissance, ou les chorégraphies maîtrisées des corps luttant ou s’étreignant. Le temps s’étire jusqu’au malaise, comme dans sa vidéo Kissing in a Cabriolet, dans laquelle un couple n’en finit pas de s’embrasser langoureusement dans une voiture hollywoodienne, éclairé par la lumière factice des plateaux de tournage. Toutefois, si les blessures, les cicatrices et le sang sont indéniablement feints, la mélancolie qui se dégage des portraits de Julie Coulon, qui apparaissent toujours légèrement anachroniques, a de quoi affecter durablement.

Camille PaulhAn pour le catalogue des diplômés 2020