Strangers May Kiss 2022

 Les inconnus s’enlacent, la sensualité de leur baiser résiste à l’érotisme : nul ne pourra en corrompre la tendresse.

Strangers may kiss, première exposition personnelle de la jeune artiste, déploie avec douceur toute l’étrangeté du déjà-vu des canons cinématographiques. Couple en fuite, cabriolet, loup, flingue et cavalier : la photographe-vidéaste, éprise de l’iconographie hollywoodienne, laisse le sacré et le profane se côtoyer jusqu’à se heurter avec force à leurs propres esthétiques. Cherchant l’instant limite où l’étreinte se mue en affrontement et s’enlise dans l’insolence, la jeune artiste tâche les visages de sang éclaboussé et rend alors visible le récit intérieur du sacrifice et de la passion, de la violence et de la sensualité.

Convoquant ses images de cœur, du Caravage à John Cassavetes, leur empruntant la puissance des symboles, Julie Coulon alterne entre photographies picturales et vidéos hypnotiques. Pourtant, c’est à la croisée du réel que l’artiste construit ses récits : un hommage à Pier Paolo Pasolini la pousse aux portes de Naples, ses acteurs s’embrassant ne sont autres que de véritables amants.

A mi-regard entre mise en scène et dévotion documentaire, quels fragments des fictions passées retrouveront-t-on dans le réel, si l’on garde l’œil ouvert ? Le vrai-faux se joue de nous, laissant s’immiscer le doute, au seuil d’une vie fantasmée où les inconnus pourraient s’embrasser - comme dans les films.

Jeanne Burin des Roziers


« Julie Coulon, invite à traverser l’écran, à la poursuite d’un récit en technicolor où la vie serait comme dans les films. »
— Jeanne Burin des Roziers